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  • Mito y poder en las sociedades contemporáneas
    Mythe et pouvoir dans les sociétés contemporaines
    Mabel Franzone - Alejandro Ruidrejo (dir.)

    M@gm@ vol.11 n.2 Maggio-Agosto 2013

    UN MONSTRE DU PROGRÈS, LE FAMILIER : ANALYSE D’UN RÉCIT POPULAIRE


    Mabel Franzone

    mabel.franzone@gmail.com
    Profesora de Letras UNSa (Universidad Nacional de Salta); Colaborador Observatorio Procesos de Comunicación, miembro del Comité Científico de la revista M@gm@ y el Comité Científico de los Cuadernos de la revista M@gm@ publicado por Aracne de Roma; Miembro Instituto de Estudios Filosóficos de Salta (CEFISA) ; Doctorado en Literatura - La Sorbonne Nouvelle-Paris III- Doctorado en Sociología dirigido pour Michel Maffesoli. La Sorbonne- Paris V; Miembro del CEAQ (Paris V) - Miembro del CRICCAL (Paris III).

    « Monstres sont des choses qui apparaissent outre le cours de la Nature...sont le plus souvent signes de quelque mal à advenir »    Ambroise Paré

    L’arrivée des Espagnols en Amérique avait provoqué une rupture dans l’imaginaire des sociétés autochtones- les morts collectives étant l’un des problèmes laissant des cassures irrémédiables. Mais cela ne s’était pas terminé et une reprise de la colonisation allait avoir lieu dans le courant du XVIII. Bien que faite d’une manière moins violente, elle réveilla des tensions, menaçant l’équilibre des communautés. A ce- moment là il s’agissait de s’approprier de la terre et de mettre en place tous les moyens connus d’exploitation des richesses et de multiplication des biens. L’une des façons de contribuer à cet enrichissement fut la création de monstres ou des bêtes féroces investies des pouvoirs terribles afin de justifier les procédés brutaux et sanguinaires des patrons.

    Le Familier est une légende encore vivante dans le nord-ouest Argentin, légende transmise par nos grands parents ou par les livres écoliers ; elle se voit renaître et renouveler  avec les jeunes écrivains épris de l’imaginaire local, une revivification du contact avec l’inconscient collectif  [1] ». Plus qu’une légende, on dirait que cela tient du réel, tellement elle est présente. C’est bien un monstre, un grand chien noir avec des yeux en feu, toujours prêt à dévorer les ouvriers des moulins à sucre qui réclamaient pour ses droits ou simplement voulaient leur salaire. L’essor de l’industrie du sucre contribuait à la reproduction de ces monstres par des centaines et tout au long de l’Amérique Latine. Des êtres semblables, des « parents » apparaissaient avec l’installation des broyeuses de minéraux ou des moulins à céréales. C’était le temps du Progrès, le temps du Mythe du Progrès venu de la vieille Europe. Avec ce mythe vint aussi une vaste matrice comprenant la science, la technique, la production, la raison et le bonheur, éléments que l’on trouve dans les sociétés de contrôle et de domination. Dans ces sociétés, la dispute pour la possession de la terre fit surgir une lutte dans laquelle tous les moyens étaient bons. Une fois la terre conquise et ses propriétaires bien déterminés, il s’agissait de la faire produire du point de vue du pouvoir dominant, soit sous forme de propriétés, soit comme quelque chose de volatile comme l’argent. A cet effet les moyens connus d’exploitation des richesses et de multiplication des biens furent mis en place. L’une des façons de contribuer à cet enrichissement fut la création de monstres ou de bêtes féroces. Mais un monstre n’apparaît jamais seul, il surgit dans un contexte de transgression, d’un champ structurel. Il transgresse les limites inhérentes à la sphère du connu, du moi, entre dans le « ça » [2], que ce soit d’ordre pulsionnel, d’ordre économico-historique ou physico-chimique. Ce ça est une espèce de dépôt désorganisé de toutes les négations, de toutes les contradictions.

    Tout monstre est une création intellectuelle, nous dit Jean Brun [3]. Il est aussi une impossibilité biologique, et bien qu’il n’y ait aucune chance pour l’existence réelle de ce type d’être, il y a une essence qui réside dans un désir de transmigration qui, à son tour, repose sur la transgression. Cette transmigration est représentée dans la quantité de formes qu’il peut assumer, surabondance d’organismes qui ne respectent aucune organisation, le monstre est l’Autre des autres, l’altérité maximale. La transgression sera donnée, dans le cas nous allons analyser, par ce que l’on veut atteindre avec la création intellectuelle d’un être distinct et maléfique.

    Berta Vidal de Battini recense 11 versions de « Le Familier » dont le signifié varie d’une province à l’autre. Pour ce chercheur, il représenterait, dans le Nord-Ouest argentin (Jujuy, Salta, Tucuman) un monstre vivant dans les usines ; dans d’autres provinces, non seulement il change d’aspect, mais de valeur symbolique, puisque dans la province de San Luis il apparaît sous la forme d’un énorme serpent qui accourt pour protéger les vaches en train de vêler [4]. Nous nous occuperons du Familier de la version du Nord, version recensée par Adolfo Colombres. Cet être fait partie « des  enfants de la terre »  par la richesse de formes qu’il assume - générosité propre aux images « terrestres »- et parce que c’est un être appartenant à un inframonde, de sous la terre. C’est aussi un être inventé par les détenteurs du pouvoir économique pour parvenir à leurs fins, qui est de s’enrichir. Ainsi, selon les dires de Raoul Girardet, « à la corruption par l’or, correspond la corruption par le sang » [5] car les puissants, à seul effet de voir croître leur capital, et à travers ce monstre, on fait tuer des milliers et des milliers d’ouvriers.

    Apparenté au Chien cerbère [6] « nuestro Familiar tiene rasgos propios que le dan plena ciudadanía en nuestra cultura. » Il est dit chien cerbère [7]  car il est fait allusion à l’enfer, par conséquent à une logique religieuse, de lumière et de ténèbres, et même à une descente vers les ombres néfastes de la nuit noire, où cet animal, qui fait partie d’une armée souterraine, deviendra l’instrument de ce que Raoul Girardet appelle « l’arrivée de l’empire des ténèbres au milieu d’une logique de complot [8] ».  S’il ne s’agit pas véritablement de complot, car il n’y a ni pouvoir à faire tomber ni réputation à salir, c’est plutôt de pouvoir à accaparer dont il est question, car il y a des richesses à s’approprier et surtout les protestations des masses à étouffer. Sur le terrain obscur où agissent ces monstres, s’articulent parfaitement le pouvoir et la force. Ainsi le chien cerbère créole est-il un chien noir [9]   « color de la muerte y del pecado, de refulgente mirada (hay quien dice que hecha fuego por la boca y los ojos) y largas uñas, capaz de desgarrar a la víctima en un santiamén, pero nunca de tres cabezas. » Nous voulons souligner que cet animal apparaît dans presque toutes les mythologies en relation avec le monde d’en bas, avec les empires invisibles qui régissent les divinités « chtoniennes » ou lunaires. Il apparaît lié à trois éléments - terre, eau et lune - dont la convergence dénote un signifié occulte, où s’unissent vie consciente et vie inconsciente [10]. Il convient de signaler également l’attention concentrée sur la description de la tête- une fixation symbolique-, avec les yeux et la bouche crachant du feu. Symbole infernal de « la bouche d’ombre », passage entre le jour et la nuit, entre la vie et la mort, et qui peut servir aussi bien à des initiations qu’à des fines purement macabres et digestives. C’est précisément le cas de notre « Familier » car s’il y avait un doute sur ses origines infernales, l’ouvrier, en imaginant la gueule et les yeux crachant du feu, eut la certitude de sa présence ténébreuse.

    Dans l’invention de ce monstre se trouvent liés tous les fils de la manipulation exercée par le pouvoir économique. Et dans le cas présent, par les propriétaires de fabriques, à l’époque de l’expansion de l’industrie sucrière. Colombres rapporte : « Cualquiera que sea la forma que asuma, el Familiar se alimenta de carne humana. El patrón de la estancia o dueño de ingenio (al parecer los únicos que prohijan este animal) tendrá que suministrarle un peón al año, que es su ración mínima, aunque hay pactos que establecen una dieta más nutrida. » Face à la volonté conquérante et disciplinée du pouvoir économique, il n’y aura qu’une masse dépossédée de ses biens et de sa dignité. Et manipulée par le royaume des ténèbres où se réfugient « les bêtes immondes. Immuable, permanent à travers l’énorme masse de représentations iconographiques et de ses expressions littéraires, il existe un bestiaire du complot [11]  ». Et dans ce bestiaire entreront les animaux dont les caractéristiques correspondent à la maudite animalité et à la maudite féminité. Quel meilleur élément pour provoquer la terreur que celui de la faim du monstre liée à sa gueule obscure ? Dans les structures anthropologiques de l’imaginaire, nous sommes en présence d’un fort exemple d’archétype du monstre, appartenant au Régime Diurne, parmi les symboles « thériomorphes »  Si la première expression de la thériomorphie était la fourmilière anarchique qui se transforme en agressivité, il y aurait ici un déplacement du schéma animal vers un symbolisme « mordicant », « le sadisme dentaire [12]. Par transfert, la gueule va concentrer toute la négativité animale, qui se convertit en archétype dévorateur [13]. Et pire encore, anthropophage. Car il se nourrit de chair humaine, et plus sélectivement encore, c’est avec les ouvriers de la fabrique qu’il rassasiera sa faim. Adolfo Colombres évoque un pacte qui lierait le patron ou le propriétaire au monstre. Il nous renvoie clairement au « pacte avec le diable » qui nourrit tant d’histoires populaires et qui fut cause de tant de procès sanctionnés par des morts sur les bûchers au temps de l’Inquisition. Ce pacte implique que quelqu’un vend son âme contre l’obtention de richesses, de renom ou de jeunesse. Le pacte du propriétaire de la fabrique avait pour but l’obtention de biens matériels [14] et sans doute n’hésitait-il pas à « augmenter » la ration pour apaiser le monstre. En réponse aux exigences croissantes du « Familier », l’oppression sur les gens grandira, aussi la peur et les diverses formes assumées par la bête maligne.

    Un tel monstre ne se présentait pas toujours sous l’apparence d’un chien. Il apparaissait aussi sous d’autres formes du règne animal. Colombres précise : « Aunque con menor frecuencia, toma asimismo la forma de otros animales, como cerdo, viborón (como el que había en la bodega de Cafayate [15]), tigre, puma, oveja, burro, caballo y hasta de una mujer. » La multiplicité de formes que peut assumer ce « familier » est bien éloignée des représentations composées propres aux dieux de temps lointains non contaminés par des éléments étrangers, tels que le « Mikilo [16], numen diaguite de la terre. Si ce dernier, être véritablement hybride dans la mesure où il réunit en une seule entité différents traits animaux, est un témoignage pour rendre visuelles les multiples caractéristiques de la divinité et de la matière qu’il incarne, [17] avec le Familier, nous pensons qu’il y a un effort pour rendre crédible l’existence d’un tel monstre en utilisant la part négative des représentations desdits animaux. Il existe la possibilité que tant de figurations dissemblables relèvent de la création populaire, obéissant justement aux images composées propres aux mythologies indigènes de la zone [18]. Nous ne sommes pas en mesure d’affirmer l’une ou l’autre possibilité et Adolfo Colombres ne donne aucune précision à ce sujet. Notre sentiment est que comme il s’agit d’une créature venue de l’Enfer, ce monde doit être habité par d’étranges formes ou qu’un certain nombre d’entre elles se trouvent incarnées dans le Familier pour témoigner de sa force. Dans ce cas, la mobilité des formes assume plutôt un caractère dissuasif. Nous pouvons toutefois relever que parfois il prendra la forme d’une femme ce qui nous indique que nous sommes devant l’aspect négatif de la femme et de l’animal, par conséquent dans un Régime Diurne de l’Image [19], comme nous l’avons précédemment indiqué.

    Quelle que soit la forme sous laquelle il se manifeste, ce monstre effrayera toujours les hommes. Dans le récit, il est dit : « Su aspecto es siempre terrible, pero no se distancia mucho de la naturaleza, si exceptuamos el caso de una serpiente de dos cabezas que merodeaba el campo santiagueño. » En effet, parmi les formes que peut assumer le Familier, l’unique animal qui ne soit pas un mammifère est le serpent. Celui-ci « fait écho par son existence même, à l’aube des temps, source de toutes les terreurs [20]. En effet il y a quelque chose d’obscur et de redouté chez cet animal qui en fait un digne représentant des Enfers. Peut-être est-il en relation avec notre part de ténèbres. Pour Jung, « le serpent est un vertébré qui incarne la psyché inférieure, le psychisme obscur, ce qui est rare, incompréhensible, mystérieux » [21]. Touchant aux couches les plus profondes de notre inconscient, - car il peut assumer aussi bien une forme masculine que féminine puisqu’il s’enroule sur lui-même, avale, digère, [22] -, il serait en relation avec les couches les plus profondes de la terre, d’après le psychologue. Nous ne nous étendrons pas davantage sur le symbolisme de l’ophidien, car cela nécessiterait trop de pages. Nous dirons seulement que nous voyons en lui un message de renouvellement, de quelque chose qui toujours renaîtra. Nous nous demandons si l’âme des hommes de cette époque en Argentine assurait la survivance du monstre à travers cette forme symbolique, car c’est celle qui resta le plus gravée dans la mémoire populaire.

    Mais cette légende a des caractéristiques de réalité. Dans le texte, il est dit : « La leyenda está muy difundida en Tucumán, Salta y Noroeste de Catamarca, con irradiaciones a Jujuy y Santiago del Estero. Pero por el lugar que ocupa en la vida cotidiana de los campesinos, más que una leyenda parece una realidad. Cualquiera de ellos tendrá siempre mucho que contar respecto a esta encarnación demoníaca. » Pour notre part, comme le rapporte Berta Vidal de Battini dans la version de Salta, nous avons entendu que les ouvriers qui « disparaissaient » étaient ceux qui réclamaient pour leurs droits car ils travaillaient 24 heures sur 24 et recevaient pour tout paiement du sucre, quelques feuilles de coca et une paire de sandales. Lorsque les réclamations étaient exprimées, leurs auteurs étaient tout simplement jetés dans le moulin à sucre si bien que de cette manière leurs corps disparaissaient vraiment car ils étaient broyés [23]. Ceci eut pour effet de donner naissance à une autre légende populaire du même style. Nous nous rappelons avoir entendu raconter dans la province de Salta qu’à sa mort, un propriétaire de plusieurs fabriques sucrières, répondant au nom de Patron Costas se métamorphosa en énorme serpent c’est-à-dire en l’une des formes assumées par le Familier. Nous en déduisons que pour le peuple, il s’agissait du diable en personne [24] qui se manifestait sous la forme d’un serpent, preuve qu’il avait vendu son âme.

    Mais, avec le progrès, ces « Familiers » augmentèrent en nombre. Dans une autre partie de son texte Colombres déclare : « Dichos perros se multiplicaron demasiado hacia fines del siglo pasado con el auge de la industria azucarera. Los dueños de ingenio se enriquecieron de la noche a la mañana y la mentalidad popular encontró pronto la explicación. Había ojos de fuego que se paseaban por la noche del cañaveral. Espantosos ruidos de cadenas. Feroces y fugitivas formas que dejaban al pasar un fuerte olor de azufre. » [25]. De ce mythe du « Familier » ressortent les paramètres de production et de domination, car cela correspondrait à la période allant de 1875 à 1914 au cours de laquelle débutent des processus de diversification et d’industrialisation [26]. Les lois du marché exigeaient une plus grande production à coût moindre, par conséquent cela se faisait au détriment des ouvriers. Cette production irrationnelle entraînera des réponses irrationnelles, ce qui aura pour effet l’émergence de légendes comme celle que nous analysons, des êtres fabriqués par le pouvoir pour justifier leurs actions face à l’opinion populaire et, en contrepartie, la croyance du peuple qui, non seulement assimile l’invisible et ce qui lui fait peur, mais  l’incorpore en lui attribuant des caractéristiques encore plus diaboliques ou en lui donnant, comme le rapporte Colombres, une explication le portant à voir le mal personnifié, se promenant la  nuit, impunément à travers les champs de canne à sucre.

    Ce mal revêt des caractéristiques de quelque chose qui existe mais qui n’est pas véritablement vu, qui est entrevu ou senti par tous les sens, comme les lueurs des yeux à travers la canne à sucre ou les bruits de chaîne propres aux fantômes du nord européen, et même la forte odeur de souffre qui nous rappelle celle qui précédait toute apparition diabolique. Tout vint s’ajouter au désordre instauré par l’introduction de certains moyens de production. Un tel désordre s’est inscrit dans les rêves collectifs. Raoul Girardet nous dit que « c’est par l’examen de ses rêves qu’une société révèle le plus sûrement ses désordres et ses souffrances » [27] . Il ne fait aucun doute que la période de « progrès économique » favorisa la création de légendes, comme une façon dérivée d’expliquer les morts occasionnés par l’enrichissement de certains secteurs de la population. Ces légendes se répandirent non seulement en Argentine, mais au Pérou avec l’apparition du « pishtako » que commercialisait la graisse humaine, en la vendant à prix d’or aux « gringos » [28]. Cette créature vivait aussi dans les fabriques, non plus de sucre, mais en relation avec les moulins à céréales, ou le broyage de minéraux. La machine diabolique aurait suscité des activités illicites « l’assassinat d’ouvriers ou d’indiens »[29]  avec la réponse populaire habituelle, à savoir la fabulation créatrice de mythes et de légendes. Ce « pishtako » est encore plus ténébreux que notre « familier » car il vendait la graisse humaine comme combustible pour les moulins ou les fabriques d’alcool. Le produit avait d’autres vertus ainsi que le rapporte la légende : « La graisse, de plus, rajeunissait les choses et attirait la fortune : l’argent pleuvait à travers portes et fenêtres en d’interminables giclées de brillantes petites pièces de monnaie [30] ». Sans doute la propagation de telles légendes était-elle une façon de justifier l’enrichissement procuré par les broyeuses, enrichissement qui tombait toujours entre les mains des « gringos ».

    Si, avec le pishtako péruvien, les cadavres apparaissaient éventrés ou décapités, avec le Familier argentin, les corps disparaissaient littéralement. Peut-être conséquence des faux noires et dévoratrices, figurations du soleil noir, de ce soleil dévorateur et ténébreux, parent proche du Chronos grec, « symbole de l’instabilité du temps destructeur, prototype de tous les ogres du folklore européen » [31]. Par ailleurs, le temps lié au progrès est le temps linéair [32], celui qui regarde toujours vers l’avant, car le progrès est sans limites. C’est le temps en relation aussi avec le mal, la violence, la poursuite fatale ou l’errance aveugle. Comme le temps qui aiguillonne les péons des fabriques ; Rappelons que le Familier était une bête qu’il fallait nourrir, puisque tel était le pacte, comme le commente Colombres « Y peones golondrinas que desaparecían de pronto sin despedirse de nadie. Corría el rumor de que en los sótanos o en la chimenea del ingenio había un perro negro. A veces el patrón lo soltaba para que eligiera la víctima de su gusto, en correrías que enloquecían a los demás perros, y que sólo el canto del gallo podía interrumpir. » Les péons hirondelles étaient ceux qui travaillaient à diverses récoltes, allant d’un endroit à l’autre, suivant le rythme des saisons, sans rester à un endroit fixe [33]. Comme en général il s’agissait de gens venus d’autres contrées, ils n’avaient pas de parents proches s’inquiétant pour eux, ils étaient donc la proie idéale à faire disparaître. Tout était disparition et obscurité, tant celle de la nuit, que celle des lieux où se trouve l’incarnation du mal : les caves ou les cheminées. Bachelard nous dit que « le rêveur de cave sait que les murs de la cave sont des murs enterrés…des murs qui ont toute la terre derrière eux. Et le drame s’en accroît, et la peur s’exagère…La cave est alors de la folie enterrée, des drames murés [34]. L’espace clos devient un espace criminel, un espace intime de manipulations souterraines où hommes et destins sont passibles de voir la fin. Et ceci serait lié à quelque chose qui n’est pas nommé dans le récit mais que Bachelard met en évidence : il doit y avoir un escalier qu’il faut toujours descendre et qui est ce qui caractérise l’onirisme [35]. C’est à dire le schéma de descente ou d’ascension qui, si dans un rêve normal, devrait être salvateur, par l’ascension, dans ce cas du « Familier » agit par inversion car il devient la perte de l’homme. Qu’il monte ou descende, le péon de la fabrique est perdu. La même horreur l’attend, en haut comme en bas ; l’être de l’inframondese répète et le harcèle, il n’est point de salut possible.

    C’est sur cette scène que courent les victimes et le bourreau de la même manière que court la rumeur : sans que nul ne les voie. Seuls les autres chiens semblent les percevoir et ils vont faire partie du cœur désespéré des ombres. Dans le royaume de la nuit se joue avec des absences un motif du fantastique selon les dires de Roger Caillois [36]. Ce thème nous rappelle le conte de Cortazar « Casa Tomada [37] » où deux frères sont harcelés par une présence bruyante qui peu à peu s’empare de la maison, si bien que les deux frères doivent abandonner la maison et jeter la clé dans un égout. La « présence » est aussi quelque chose ou quelqu’un que nul n’a vu, mais seulement senti, entendu, craint.

    Si nous suivons la présence, même à peine évoquée, de l’animal, nous dirons avec Gilbert Durand que les deux premiers thèmes négatifs inspirés par le symbolisme animal sont la terreur face au changement et devant la mort dévoratrice [38]. Le Familier nous offre un bon exemple d’un isomorphisme négatif des symboles animaux, des ténèbres et du bruit. Il constituerait un puissant symbolisme « nyctomorphe » renforcé par la poursuite qui aura lieu lorsque le patron libère le monstre pour qu’il choisisse sa victime. Comme si les ténèbres de la nuit noire étaient synonymes d’activité, de même l’espace est sans limites et la poursuite est ainsi déchaînée de manière illimitée. Tout prendra fin avec l’arrivée d’un autre animal, le coq, incarnant la lumière du soleil, le bien car il est associé au Christ. « Comme il annonce l’avènement de l’astre du jour, il est efficace contre les influences maléfiques de la nuit…le chant du coq fait disparaître les démons et met fin au sabbat du sorcier…le coq est aussi l’emblème du Christ dans la symbolique romaine  [39] ». Ainsi, le coq devient la contrepartie de la nuit dans la logique duelle du Régime Diurne dans lequel s’inscrit le récit. La lutte est polarisée en ténèbres-lumière ; mal-bien, diable-Christ, chien-coq. « Le monstre résiste mal à la lumière de la raison : que vienne le jour et il s’esquive...  [40] »

    Il y a toutefois des moyens de mettre fin aux jours du monstre et aux oppositions avec un symbole chrétien, celui de la croix ; symbole traduisant une transcendance et qui résout les antagonismes avec une synthèse temporelle et une totalisation spatiale : «  Nada le hacen al Familiar las balas ni el filo de los machetes. Sólo retrocede ante la cruz y el puñal. Es decir cede al poder del signo y no del alma. Hay quien dice que se opone al progreso, citando como ejemplo al ya famoso Familiar del ingenio Santa Ana, de Tucumán, que se echó en las vías del ferrocarril que unía esta fábrica a río Chico y la red nacional el mismo día de su inauguración, impidiendo el paso del primer convoy. ». En effet lafaçondecombattre le monstre n’est pas banale, cela doit se faire avec le crucifix et le poignard. Le manche de celui-ci a aussi la forme d’un crucifix et s’agissant d’une « arme à double tranchant » est marqué de la dualité au sens même de l’axe. Par conséquent, si nous suivons René Guénon, on peut voir ici une allusion aux deux courants qu’il incarne, comme les deux serpents du caducée. Ces deux courants seraient en relation avec les deux pôles et les deux hémisphères, ce qui permet de voir que, dans ce poignard, s’unissent en réalité deux symbolismes [41]. Au fond, il s’agit d’une force double, bien que d’essence unique en elle-même, mais aux effets apparemment opposés en leur manifestation, comme conséquence de la polarisation qui conditionne à des niveaux différents tous les degrés et modes de manifestation universelle [42]. Plus clair encore est le symbolisme de la croix. Symbole de totalisation spatiale, union des contraires, réunion de forces, il est pour les anciens Mexicains le symbole de la totalité du monde, car Xiuhtecutli, le dieu feu qui demeure dans le foyer de l’Univers est la croix même. Lieu de synthèse, ce dieu - centre présente un visage ambigu : un aspect néfaste et un autre favorable. Il est la « ligature » centrale des années, et donc du temps. Il est le symbole statique qui manipule le temps et un archétype appartenant aux structures synthétiques de l’imaginaire, du Régime Nocturne, agit avec une dialectique dramatique, où s’accentuent les valeurs messianiques et de résurrection. Telle est la manière par laquelle le récit ou la légende donne le moyen de résoudre les contradictions, c’est-à-dire par une « coincidencia oppositorum [43] » Il n’y a pas unification mais distinction cohérente des oppositions, « cohérence dans le contraste [44] ». Les contradictions deviennent collaboration dynamique avec le devenir, faisant de celui-ci un allié de toute maturation et de toute croissance, le tuteur vertical de tout progrès [45]. Le sens d’un tel progrès « imaginaire » s’oppose à celui du progrès économique, carsi danscelui-là le temps devient circulaire, temps permettant « une rêverie cicloïde et rythmique » [46]. Et en effet, dans le récit, le Familier s’oppose au progrès, car il s’oppose aux avancées. C’est ainsi qu’un des monstres se couche sur les rails d’une voie ferrée pour en empêcher l’inauguration. Il semblerait que la bête, comme partie articulée d’un récit devenu collectif, obéisse plutôt aux lois de l’imaginaire qu’aux lois économiques.

    On pourrait situer cet épisode du train entre 1880 et 1890, époque où les réseaux de chemin de fer se développent notoirement en Argentine. En effet, les premiers trains n’allaient que de Buenos Aires au sud du pays, puis arrivèrent jusqu'à Mendoza pour s’étendre ensuite à tout le territoire [47]. Mais cela ne résout pas l’incohérence du Familier qui, tout en étant un monstre du progrès, s’y oppose dans le même temps férocement. Nous conclurons avec la phrase finale du récit de Colombres : «  Pero no es legítimo sacar de un solo caso una conclusión general, y más cuando resulta inobjetable que fue el progreso económico lo que hizo crecer el número de esas bestias. ¿No será el Familiar, por el contrario, un símbolo de la faz carnívora de ese progreso ? » Contradiction au sein du dualisme, la bête maléfique, enfant du progrès, le rejette. Peut-être est-ce une partie de la fabulation qui, en devenant collective, acquiert des caractéristiques non manipulables, se met à croître et à prendre des traits et des comportements imprévisibles par ceux qui la lancèrent. C’est ainsi que les « familiers » se sont multipliés et sont devenus voraces, au point de vouloir protéger leurs propres demeures, les raffineries et leurs ouvriers. Pour nous il s’agit plutôt d’un élément d’une légende répondant à des cohérences « imaginaires » et non productives. Suivant Gilbert Durand, nous dirons qu’il est possible que ce monstre inverse son propre sens, devienne un protecteur, un talisman contre la violence [48] et la pauvreté engendrée par les changements de moyens de production. Cette inversion agit comme double négation du temps, dont l’effet est d’euphémiser la mort, ce qui nous conduit définitivement au régime Nocturne de l’Image  [49]. Toutefois, nous croyons avec Colombres que c’est quelque chose né de la face « carnivore » du progrès, qui, comme nous l’avons dit, ne coïncide pas avec le progrès traité avec les symboles cycliques de l’imaginaire.

    Le monstre, nous dit Jean Burgos, nous renvoie à l’anti-monde, qui est justement celui qui voulaient évoquer les bas-reliefs et les chapitaux des églises romaines comme les triptyques de Brueghel et les enluminures des Livres sacrés : anti-monde qui, par ses excès et extravagances, dérange celui-ci et l’oblige à retrouver son ordre et sa mesure ; mais anti-monde aussi qui devient le signe de ce qui est déviant, volontairement divergent et par système transgresse toute limite [50]. Ici il y avait volonté de figurer des aberrations morales, infraction au bon ordre des choses. Par cette volonté apparaît ce « familier » couché sur les voies ferrées, empêchant le progrès de continuer le massacre, représenté cette fois par l’arrivé des trains.

    Conclusions

    Ce «familier » a, pour nous, la particularité d’être encore vivant dans certaines régions d’Argentine. Il correspond à l’une des formes de l’imaginaire, à celle de mythes créés par le pouvoir qui recevront en contrepartie une réponse populaire. Incarnation du progrès économique, il se posera finalement en opposition avec lui, la bête empêchant l’inauguration d’une voie ferrée, contradiction illustrant l’absolue indépendance des êtres créés par l’imagination, comme si, à un moment donné, cet être répondait si bien aux caractéristiques qui lui sont prêtées et qu’après il se libère de ses maîtres. Cette apparition correspond à d’autres apparues dans des pays voisins lors de l’arrivée des raffineries, des broyeuses. La violence de la machine réveilla des rêves de grande agressivité. Si, comme le dit Raoul Girardet, c’est par l’examen de ses propres rêves qu’une société rend compte de ses désordres et de ses souffrances, il est hors de doute que l’introduction de machines, d’autres moyens de production et même d’un autre ordre économique, laissa des traces profondes chez la population indigène et métisse de l’époque en Argentine. Ces rêves deviennent un exutoire au moyen duquel le peuple explique la cruauté de tels moyens et celle de ceux qui la mettent en œuvre. Le Familier assume tout un bestiaire : bestiaire de l’horreur, mais il est non moins vrai que, en tant qu’être polymorphe, il est le véritable fils de la matière qu’il incarne, la terre. En effet, les êtres d’origine terrestre se caractérisent par la grande prolifération de leurs formes. Et bien que nul n’ait vu de façon certaine le familier, mis à part quelques éclats d’yeux resplendissants au milieu des champs de canne à sucre, sa forme est comme un vide qui s’emplirait de l’un ou l’autre animal - les plus fréquents étant le chien et le serpent - et de l’un ou l’autre contenu sémantiques, en fonction des circonstances, dans d’autres provinces il aura un rôle positif comme celui de veiller sur les vaches lorsqu’elles mettent bas.

    Le récit se déplace dans une logique dualiste, où les éléments se présentent en lutte, deux par deux : chien contre coq, lumière contre ténèbres, bien contre mal. Toutefois, les lois de l’imaginaire fonctionnent en donnant toujours une solution au drame humain et le récit inclut une solution possible qui mettra fin à la terreur qui étreint les ouvriers : la croix ou le poignard, images riches oniriquement parlant, capables de résoudre les contradictions, non par l’absorption de l’une d’elles, mais par le respect des deux, c’est-à-dire dans une structure dramatique qui entend une cohérence dans la différence. Croix et poignard deviennent les symboles - archétypes totalisateurs du temps et de l’espace - qui permettent à la fois une sortie distincte avec une structure synthétique, structure qui intègre les intentions de l’imaginaire.

    Et à Jean Burgos les mots de la fin : « Car l’homme, qu’il se reconnaisse ou trop bien ou trop mal en eux (les monstres), nourrit ces monstres qui l’habitent et l’obligent à se mesurer, à s’interroger ; mais l’obligent aussi, sauf à être dévoré, à écouter dans sa nuit leurs réponses : celles des dieux de ses rêves [51] ».

    Notes

    1] Jung cité par Mircea Eliade in Mythes, rêves et mystères. Gallimard. Paris, 1957.p. 276.

    2] Jean Brun. Le Retour de Dionysos. Les Bergers et les Mages. Paris. 1976. p. 145.

    3] Ibidem. p.142.

    4] Berta Vidal de Battini. Cuentos y Leyendas Populares de la Argentina. T. VIII. Buenos Aires, Ediciones Culturales Argsentina. pp. 801-820.

    5] Raoul Girardet. Mythes et Mythologies Politiques. Ed. du Seuil. Paris. 1986. p. 41.

    6] Colombres rapporte « Qui n’a entendu parler du formidable chien cerbère muni de trois gueules, aux yeux  flamboyants, au poil noir et  aux grandes griffes qui gardait l’entrée de l’Hadès? ». Seres Sobrenaturales de la Cultura Popular Argentina. Ediciones del Sol. Buenos Aires,1992. pp. 128-129.

    7] Rappelons que le chien Cerbère  était le gardien de l’Hadès, dont il gardait l’entrée empêchant les vivants d’y entrer. L’image la plus courante est celle d’un chien à trois têtes, nanti d’une queue terminée par une tête de serpent, brandissant dans son dos une multitude de têtes de serpents. Pierre Grimal. Dictionnaire de la Mythologie Grecque et Romaine.PUF, Paris, 1999.. p. 86.

    8] Raoul Girardet. Mythes et Mythologies Politiques. Op. Cit. pp. 41-42.

    9] Un autre chien noir très connu en Argentine est le « Lobisón », animal de la taille d’un veau d’un an. Il s’agit d’un homme, qui, se transforme en loup garou. Berta Vidal de Battini. Op. Cit. p. 537.

    10] Jean Chevalier. Alain Gheerbrant. Dictionnaire des Symboles. Ed. Robert Laffont, Paris. 1982. p. 239.

    11] Raoul Girardet. Mythes et Mythologies Politiques. Op. Cit. p. 43.

    12] Gilbert Durand. Les Structures Anthropologiques de l’Imaginaire. Ed. Dunod. Paris, 1984. p. 89.

    13] Ibidem. p. 90.

    14] Dans la compilation de Berta Vidal de Battini se trouve « Le Familier de la distillerie La Esperanza » où il est clairement fait allusion à un contrat avec le diable en personne … Et on raconte qu’ils y souscrivaient (au pacte) et qu’ils étaient de plus en plus riches ». Cuentos y Leyendas Populares de la Argentina.Tomo VIII. Op. Cit. p. 803.

    15] Petite ville de la province de Salta, où il y a une grande quantité de vignobles et par conséquent de caves.

    16] Numen de la terre, ancienne déité diaguite, non contaminée semble t’il par des éléments incaïques ou chrétiens. « Animal démoniaque qui a un corps mi-homme, mi-chien. Ses mains sont celles d’un enfant et ses pieds comme ceux du coq. Sa queue, longue et couverte de plumes... … Ses traces sont celles du lièvre…et du cochon quand il se vautre dans la terre. » Adolfo Colombres. Seres Sobrenaturales de la Cultura Popular Argentina. Op. Cit. pp.122-123.

    17] Propres au paganisme, ces images sont dites « paniconiques » car elles portent au paroxysme le désir d’appréhender, d’un seul coup d’œil, la totalité de la nature divine. Dimitri Meeks. « Zoomorphie et image des dieux dans l’Egypte ancienne » in Charles Malamoud et Jean- Pierre Vernant (sous la dir. de) Corps de Dieux . Gallimard, Paris. 1986. p. 248.

    18]   Les communautés linguistiques chiriguano-chané, diaguita-calchaquí, mataco-mataguayo et toba appartiennent à la province de Salta .Voir Adolfo Colombres. Seres Sobrenaturales de la Cultura Popular Argentina. Op. Cit. Prologue. pp. 20-21. 

    19] Régime d’antithèse, de l’hetérogéneité, de la séparation. Le Régime Diurne de l’image traite des représentations liées à la peur de la mort déguisées en animal, en ténèbres, en femme fatale et  auxquelles correspondent le schème de la chute.

    20] Jean-Paul Ronecker. Le Symbolisme Animal. Desclée de Brouwer. Paris, 1986. p. 298.

    21] Karl Gustav Jung. L’homme à la découverte de son âme : Structure et fonctionnement de l’inconscient. Préf. et traduction de R. Cahen-Salabelle. 2 ème Ed. Génève. 1946. p. 237. Cité chez Jean Chevalier. Alain Gheerbrant. Dictionnaire des Symboles. Op. Cit. p. 867.

    22] Nous faisons référence ici à la féminité ou androgynéité de l’inconscient primitif tel que l’étudie Gaston Bachelard.

    23]   « El Familiar » de Salta. Berta Vidal de Battini. Op. Cit. pp. 807-808.

    24] L’une des promenades qu’aimaient à faire les enfants avides d’histoires de terreur, était justement d’aller au cimetière rendre visite à la tombe de Patron Costas pour tenter de surprendre le « viboron ». On disait qu’une des employées de cette famille, l’une des plus influentes de la ville, lui apportait chaque jour une tasse de lait afin qu’il puisse s’alimenter. Nous n’avons pas de source connue eu égard à cette histoire car elle fait partie de ces légendes qui se répandaient oralement tant la peur suscitée par le fait même de prononcer le nom de Patron Costas était grande. La réponse populaire est la même que celle apportée par le peuple paraguayen à l’égard du général Stroessner dont on racontait qu’il se nourrissait du sang des enfants qui étaient séquestrés, les « disparus ».  

    25] Le mythe du progrès et tout ce qu’il comporte est traité par Michel Maffesoli et Gilbert Durand comme la productivité et le temps linéaire, comme un mythe prométhéen, comme le mythe qui explique une époque. « Le destin d’Occident est une trame mythologique où s’affrontent héros, titans et dieux » dit Durand. D’après lui, ce mythe surgit en 1780 et restera en vigueur jusqu’au XXe siècle. Gilbert Durand. Figures Mythiques et Visages de l’œuvre. Berg International. Paris, 1979. p. 32. Michel Maffesoli. L’Ombre de Dionysos. Contribution à une sociologie de l’orgie. Livre de Poche. Librairie des Méridiens. Paris. 1985. p. 37.

    26] Gustavo y Hélène Beyhaut. América Latina. III. De la independencia a la segunda guerra mundial. Vol. 23. Ed. Siglo XXI. Madris, 1986.p. 29.

    27] Raoul Girardet. Mythes et Mythologies Politiques. Op. Cit. Page de couverture.

    28] Nous mettons le terme« gringos »  en évidence car c’est ainsi que l’on appelait les étrangers, ou bien les blancs aux cheveux blonds. Arnao. Cuentos Peruanos. Relatos del ambiente nacional. Empresa editorial Rimac. Lima, 1939. pp. 107-115.

    29] Gustavo et Hélène Beyhaut signalent avec pertinence que l’objectif immédiat était l’organisation et le contrôle de la main d’œuvre. La production allait venir par la suite. Ceci se passa dans les endroits où l’économie avait été basée sur des régimes esclavagistes, où la continuité de l’activité était obtenue par la violence et la discipline les plus strictes car le travailleur n’avait pas d’autre perspective. América Latina III. De la independencia a la segunda guerra mundial. Op. Cit. p. 76.

    30] Aurelio Arnao. Cuentos Peruanos…Op. Cit. p. 108

    31] Gilbert Durand. Les Structures…Op. Cit. p. 94.

    32] Lorsque surgit le problème du futur, il y a rupture entre les sociétés traditionnelles où l’accent était mis sur l’immobilité et l’intensité du présent. Surgit alors une course contre le temps, qui est la production inaugurant le règne du progrès, règne sans fin tandis que le temps est une flèche qui avance. Michel Maffesoli. La Violence Totalitaire. Essai d’Anthropologie Politique. Méridiens Klincksieck. Paris, 1994. pp. 170-171.

    33] A l’époque de l’apogée économique de l’Argentine, les péons hirondelles venaient même d’Europe.

    34] Gaston Bachelard. La Poétique de l’Espace. Quadrige PUF. Paris, 1989. p. 37.

    35] Ibidem. p. 41.

    36] En effet, deux thèmes apparaissent dans ce récit : « le pacte avec le démon » et la « chose  invisible qui tue ». Les autres sont : « l’âme en peine, le spectre condamné à la course éternelle, la mort personnifiée, la malédiction du sorcier, la femme fantôme, l’intervention du rêve dans la réalité, la maison effacée de l’espace et l’arrêt ou la répétition du temps ». Roger Caillois. Anthologie Fantastique, préf. pp. 9-10. Cité par Louis Vax. La Séduction de l’Etrange. Quadrige PUF. Paris. 1965. p. 54.

    37] In Julio Cortázar. Bestiario. Ed. Sudamericana/Planeta. Buenos Aires. 1986. pp. 9-18

    38] Gilbert Durand. Les Structures…Op. Cit. p. 94.

    39] Jean-Paul Ronecker. Le Symbolisme Animal. Ed. Dangles. St-Jean- de- Braye, 1996. pp. 163-164.

    40] Jean Burgos, L. Cellier, J.-P. Collinet et al. Circé. Le Monstre I. Présence du monstre, mythe et réalité. Cahiers de Recherche sur l’Imaginaire. Sous la dir. de Jean Burgos. Ed. Lettres Modernes. Paris, 1975. p. 5.

    41] René Guénon. Symboles de la Science Sacrée. NRF Gallimard. Paris. 1972. p. 171.

    42] Ibidem.

    43] Gilbert Durand. Les Structures. Op. Cit. pp. 379 y 399.

    44] Ibidem. p. 406.

    45] Ibidem. p.399.

    46] Gilbert Durand fait allusion à cette structure dramatique dans « la structure historienne de l’imaginaire », car les philosophies de l’histoire sont dans le prolongement et la répétition des phases temporelles qui constituent un cycle. Ibidem. p. 406.

    47] Dans la décade évoquée, le réseau ferroviaire argentin passa de 2.516 à 9.397 km. A la fin du XIXe siècle il s’élevait à 16.500 km et en 1914 à 33.500km. Gustavo et Hélène Beyhaut. América Latina III….Op. Cit. p. 51.

    48] Gilbert Durand. Les Structures…Op. Cit. p. 231.

    49] Ibidem. p. 230.

    50] Jean Burgos, L. Cellier, J.-P.Collinet et al. Circé. Le monstre I. Op. Cit. p. 17.

    51] Jean Burgos, L.Cellier, J.-P. Collinet, et al. Circé. L emosntre I. Présence du monstre, mythe et réalité. Op. Cit. p. 7.

     



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